La maman de mon partenaire sait que je ne vois plus ma mère depuis des années. Je lui en ai parlé quelques fois.
Un jour, elle me recommande vivement un livre dans lequel un type radote sur l'amour maternel. Un extrait m’a suffi: L'amour d'une mère est unique au monde… ma mère et moi sommes reliés par un merveilleux fil…
Pulsations dans les tempes. Sentiment diffus de honte. Pourquoi veut-elle que je lise ça?
Lorsque l’on me fait ce genre de suggestions, je ne peux m'empêcher de me demander si cela contient un peu de «C'est quand même ta mère». Mettons que ma belle-mère me demande si je l’ai lu; je répondrai simplement: je l'ai entamé, mais je ne suis pas capable de le lire. Et je me tairai à ce moment-là, parce qu'on ne peut pas critiquer sa maman dans notre société. Les gens déduisent que l’on est un enfant gâté, et prennent automatiquement parti pour la mère.
C'est ainsi qu'il faut apprendre à se blinder. À ne pas se fâcher. Comprendre, ne pas prendre personnellement. J'appelle ça les Olympiques psychologiques.
Ceci dit, ma belle-mère est une femme formidable. Accueillante, non-jugeante, joviale, courageuse, féminine, féministe...
Oh, et elle a encadré une photo de moi, qu’elle a accrochée au mur des portraits de famille. La photo qu'elle a choisie a été prise chez elle. Il fait chaud. Je porte un haut un peu révélateur, mais sur l’image, il révèle un brin plus que prévu, et on devine la poche de mon soutien-gorge. Le fait qu'elle ait sélectionné cette photo-là en dit long sur elle, et sur la chance que j'ai de l'avoir.
photo © https://unsplash.com/photos/5LC3PP-V-X4